07/08/2009

Juste de l'eau


Hier matin : passage à l'OCHA, institution humanitaire onusienne, qui nous fournit des cartes très détaillées sur la situation géopolitique de chaque zone palestinienne (très très utile pour comprendre les enjeux géopolitiques) : les frontières de 47 (partage de l'ONU), de 49 (après les premières annexions israéliennes aujourd'hui reconnues tacitement par la communauté internationale), celles de 67 quand Israël a tout occupe, puis celles des accords d'Oslo en 93, lesquels accords ont amené a la création des 3 zones distinguant les territoires occupés de ceux ayant une plus ou moins grande autonomie palestinienne. S'ajoutent à cela les nouvelles colonies qui n'en finissent pas, le tracé du Mur (débordant largement de la ligne verte autorisée), des autres murs, des routes de colonisation, checks points et autres positions israéliennes partout... bref, des cartes très colorées et qu'il nous faudra étudier précisément dans les jours a venir.

Nous partons ensuite participer à un convoi d'eau symbolique à destination de villages de Cisjordanie dont les Israéliens ont coupé les accès en eau, bien qu'ils soient situés en zone A, c'est à dire la zone où les Palestiniens sont censés avoir le plus d'autonomie. Dans les faits, ce sont les Israéliens qui ont le contrôle des arrivées d'eau puisque ces zones sont de petites enclaves au milieu de territoires occupés.

Des zones asphyxiées... et assoiffées. A Qarawat Bani Zatyid par exemple, les robinets sont à secs depuis des mois. Les Palestiniens doivent se débrouiller pour acheter l'eau à plusieurs km de là. Et autant vous dire qu'il fait chaud...


Le convoi, composé de citernes d'eau et de bus venant de plusieurs grandes villes, roule à travers la montagne (qui ressemble beaucoup au Moyen-Atlas d'ailleurs) et arrive dans ce village de Qarawat Bani Zatyid, du district de Ramallah, sous les acclamations (littéralement) des villageois, et surtout des enfants (3500 habitants). C'est la première fois que des internationaux viennent ainsi à eux pour leur manifester leur solidarité, leur joie donne les larmes aux yeux. Nous sommes accueillis quasiment comme des libérateurs, le groupe a alors majoritairement le sentiment d'être utile en étant juste là, a leurs côtés. Les robinets des citernes sont grand ouverts et les enfants dansent sous l'eau, remplissent bouteilles et jerricans... Les autorités du village, sur leur estrade, et les habitants viennent au devant de nous tous avec du thé, du café, des boissons. Les femmes nous embrassent. Nous discutons avec les uns et les autres de leurs difficultés pour avoir cette eau. Quand on leur demande comment les Israéliens peuvent faire une chose pareille, et comment ils peuvent se permettre les incursions que les soldats font encore régulièrement dans le village, avec toujours des arrestations à la clé, voire des morts... les Palestiniens ne comprennent même pas le sens de notre question. Pour eux, l'arbitraire d'Israël est tellement évident qu'ils ne cherchent même plus à connaitre les prétextes que l'armée se donnerait pour toutes ces exactions. Certains nous montrent leurs blessures, les photos de leurs martyrs sont affichées, dont une femme et des enfants ("martyr" signifie tout Palestinien mort sous les violences israéliennes).

Les enfants veulent se faire photographier à plusieurs ou avec une pancarte écrite en arabe, en hébreu (la majorité des Palestiniens parlent l'hébreu et un peu d'anglais...). Les jeunes garçons sont comme des abeilles autour des pots de confiture que nous sommes... C'est la Fête de l'eau. Pourtant notre aide est si fugitive...

Parmi le convoi, d'autres français, militants du NPA, des quebecquois... et plusieurs Israéliens anti-colonialistes (comme dans beaucoup de ces manifs symboliques), dont quelques juifs. Les villageois font monter l'une d'elle sur un de leurs ânes et le guident dans une vague d'acclamation au milieu de la foule. Voient-ils dans cette résistante à l'idéologie raciste du gouvernement d'Israël le dernier symbole de cet espoir ? qui sait ?

J'échange quelques mots en arabe, et surtout beaucoup de regards, avec une vieille dame assise devant sa maison, qui me présente sa famille et ses martyrs. J'aimerais tellement pouvoir lui dire toute la compassion que je ressens et toute la force qu'elle me donne en étant là, souriante, accueillante, malgré ses drames.


Notre petit groupe est ensuite accueilli chez un notable du village : thé, gâteaux... nous lançons une discussion politique dont je retiendrai l'affirmation d'un homme, très représentative semble-t-il . "je suis du Fatah, mais le Fatah d'Arafat, pas celui de maintenant". L'autorité palestinienne aujourd'hui est clairement reniée par son peuple, Mahmoud Abbas considère comme un traitre et un espion, même par les militants du parti historique.
Pour en savoir plus sur le convoi.
Premieres photos desormais en ligne.

Nous partons le soir pour Naplouse où nous serons accueillis par le français Jean et Layali. Sur la route, nous passons devant la plus grande colonie d'Ariel. Les check points sont tous ouverts (heureusement pour nous), mais cela ne signifie pas que la situation s'améliore... a suivre !

2 commentaires:

  1. Très belles photos, merci pour ton témoignage. On se sent tellement impuissant.

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  2. bravo pour votre courage

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